Depuis le 1er janvier 2016, le seuil de l’obligation de collecte des biodéchets en vue de leur valorisation est abaissé à 10 t/an (cf. arrêté du 12 juillet 2011 fixant les seuils définis à l’article R. 543-225 c. env. en application de l’article L. 541-21-1 c. env.).
Selon la circulaire du 10 janvier 2012, ce seuil correspond à environ 71 000 repas/an, soit un restaurant d’entreprise qui sert 275 repas sur 260 jours dans l’année. Le ratio retenu étant alors de 134 g de biodéchets par repas servi en restauration collective.
Sur la base d’une operation pilote rassemblant 80 restaurants, l’ADEME estime, dans un rapport de janvier 2015 (auquel nous avons contribué pour la partie juridique), que la production de biodéchets dans la restauration classique serait plutôt de l’ordre de 183 g par repas, soit 54 000 repas/an selon nos caculs, ou 207 couverts par jour sur 260 jours dans l’année. Restaurants classiques, gastronomiques, brasseries, hôtels restaurants ou encore restauration rapide, les établissements concernés sont donc très nombreux… alors que la réglementation est encore peu appliquée, y compris par les collectivités locales qui gèrent les marchés alimentaires.
Or il existe des sanctions administratives (amende administrative prévue à l’art. L. 541-3 c.env.) et pénales (75 000 EUR et 2 ans d’emprisonnement, art. L. 541-46, 8°) dont il faut tout de même se méfier.
Le chantier reste ouvert avec, notamment, la nécessaire mise en place d’une écofiscalité incitative. Un projet de décret sur la promotion de l’économie circulaire, la prévention et la gestion des déchets effleure la problématique en permettant aux maires de mieux délimiter le service public de la gestion des déchets ménagers. Mais l’incitation fiscale à collecter les biodéchets n’y est pas.
Une réduction de Redevance Spéciale (art. L. 2333-78 du CGCT), redevance destinée à financer la collecte des déchets d’activités économiques, pourrait être une solution, mais celle-ci reste très peu usitée par les collectivités locales. La Ville de Paris illustre bien la complexité de la situation. La RS a été instituée, mais les restaurateurs bénéficient d’une exonération depuis 2008, tandis que la collecte des restaurants est largement assurée par le service public (la TEOM).
Pour mémoire, on rappellera que ce montage fiscal a été critiqué par la Chambre régionale des comptes en 2011 et condamné par la jurisprudence « Auchan » du 21 mars 2014 (CE, n° 368111) qui a posé pour principe que la TEOM doit exclusivement financer la collecte des ordures ménagères, tandis que l’institution de la RS est obligatoire, à moins que la Redevance d’enlèvement des ordures ménagères (REOM) ne soit mise en place.
Mais la loi de finances rectificatives pour 2015 a pris le contre-pied de la jurisprudence Auchan et rebattu les cartes en prévoyant :
- que la TEOM peut également financer la gestion des déchets d’activités économiques (nouvel art. 1520, I du code général des impôts) ;
- que la TEOM peut comporter une part incitative à titre experimental pendant 5 ans, avant d’être étendue à tout le territoire de la collectivité ou abandonée;
- que la RS n’est obligatoire que si, sur le territoire considéré, il n’a été institué ni TEOM, ni REOM (art. 2333-78 du CGCT) ;
- que peuvent être exonérés de TEOM les personnes asujetties à la RS (art. 1521, 2 bis du CGI)
Cette palette de possibilités, relativement complexe, est ouverte depuis le 1er janvier 2016. Il appartiendra à chaque collectivité locale de choisir la recette qui lui convient pour financer la collecte des déchets ménagers et assimilés, dont les biodéchets des restaurateurs.
Certaines recettes pourront être incitatives, d’autres non, mais dans tous les cas, l’obligation de collecte des biodéchets est bien de mise… Le chemin à parcourir pour valoriser efficacement nos biodéchets reste long et complexe.